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Golfe de Fos : les oursins s'adaptent aux eaux chlorées

Golfe de Fos : les oursins s'adaptent aux eaux chlorées

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Golfe de Fos : les oursins s'adaptent aux eaux chlorées

U. Téchené U. Téchené
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Les oursins du golfe de Fos développent une tolérance à certaines pollutions. C'est le constat provisoire de « Fos Sea », une étude de l'Institut Ecocitoyen pour la Connaissance des Pollutions.

 Jean-Luc Boudenne au micro d'Ulrich Téchené
 Stéphane Coupé au micro d'Ulrich Téchené
 Karine Lebaron au micro d'Ulrich Téchené

Des oursins tolérants aux sous-produits chlorés ? C'est ce que tend à montrer une étude en cours répondant au nom de « Fos Sea ». Avec l'Institut Ecocitoyen pour la Connaissance des Pollutions de Fos sur Mer, le laboratoire de l'Institut Méditerranéen d'Océanologie ou celui de Chimie de l'Environnement de Marseille, des scientifiques travaillent à identifier l'impact sur l'environnement des rejets d'eau chlorée par les industriels.

Depuis les années 70, les industries alentours se servent d'eau de mer pour refroidir – ou réchauffer – leurs installations. Afin d'éviter la prolifération d'algues ou de moules dans les canalisations, ils chlorent l'eau de mer pompée, l'utilisent puis la rejettent dans le golfe de Fos. C'est alors que « ce chlore au contact des matières organiques va former des sous-produits chlorées dans la mer, explique Jean-Luc Boudenne, professeur des Universités, nous essayons d'identifier ces composés et nous étudions leur toxicité, sachant qu'ils peuvent être cancérigènes, reprotoxiques ou gènotoxiques ». Aujourd'hui, la somme des autorisations préfectorales permet aux industries du golfe de Fos de rejeter chaque année à la mer jusqu'à 6 millions de mètres cubes d'eau chlorée.

Les oursins ont été choisis par les scientifiques pour leur capacité de reproduction rapide car ce sont leurs larves qui sont l'objet de toutes les attentions. Dans l'étude comparative des larves d'oursins en provenance d'eaux peu polluées (L'île des Embiez) avec celles du golfe de Fos, les chercheurs ont constaté que ces dernières étaient peu sensibles au bromoforme, un des sous-produits majeurs issu de l'eau chlorée. « Après 48 heures d'exposition à 3 sous-produits de chloration, à des concentrations qui dépassent largement celles existantes à Fos, détaille la doctorante en écotoxicologie Karine Lebaron, nous constatons 90% de mortalité ou de malformations sur les larves issues de la reproduction des oursins des Embiez, tandis qu'à contrario sur celles de Fos, 80 % restent en bonne santé ». Pour Karine Lebaron et Stéphane Coupé, tous deux attachés au laboratoire de l'Institut Méditerranéen d'Océanologie, deux hypothèses sont envisagées à ce stade de la recherche: soit c'est un cas avéré de sélection naturelle, soit c'est une mutation génétique. Des analyses complémentaires vont être réalisées avec des oursins prélevés à proximité du parc naturel marin du Cap Corse.

La finalité dans cette étude ? « Fos Sea » fait partie de ces nombreuses recherches sur l'impact des polluants sur l'environnement. Les scientifiques rencontrés lors du prélèvement d'oursins lundi dernier insistent bien qu'il n'est pas de leur ressort de parler d'étude sanitaire. Ils ajoutent qu'avec l'infime concentration de bromoforme retrouvée dans les oursins de Fos, ou celles d'halophénols analysées dans les congres, « il faudrait en consommer tous les jours » pour que ce soit dangereux. Mais comme l'évoque Jean-Luc Boudenne : dans la région « on est tous soumis à des multi-pollutions donc à un moment, on atteint un seuil critique ». Pour rappel, le cumul des pollutions est une notion inexistante pour les réglementations en vigueur. Les faire reconnaître pour les prendre en compte est un des combats de l'Institut Ecocitoyen pour la Connaissance des Pollutions... L'étude « Fos Sea » va se prolonger une année encore, avec notamment des données supplémentaires concernant la gènotoxicité.

En vidéo Karine Lebaron, doctorante en écotoxicologie avec le laboratoire de l'Institut Méditerranéen d'Océanologie ; Jean-Luc Boudenne, professeur des Universités et responsable au laboratoire Chimie de l'Environnement de Marseille ; Stéphane Coupé, maître de conférence attaché au laboratoire de l'Institut Méditerranéen d'Océanologie.